La Biographie du Cardinal Joseph-Albert Malula
Joseph-Albert Malula (1917–1989) est une figure emblématique de l’Église catholique en Afrique et un défenseur acharné de l’autonomie africaine.
- <strong>Jeunesse et Formation</strong>
- <strong>Ascension dans l’Église et Engagement au Concile Vatican II</strong>
- <strong>Cardinalat et Tensions avec Mobutu</strong>
- <strong>Engagement pour l'Inculturation et la Réforme de l’Église</strong>
- <strong>Participation aux Conclaves et Réflexion sur l’Avenir de l’Église</strong>
- <strong>La Mort et l’Héritage de Malula</strong>
- <strong>Conclusion</strong>
Joseph-Albert Malula : Le Cardinal de l’Autonomie Africaine et la Voix du Peuple Congolais
Joseph-Albert Malula (1917–1989) est une figure emblématique de l’Église catholique en Afrique et un défenseur acharné de l’autonomie africaine, tant sur le plan spirituel que politique. Archevêque de Kinshasa de 1964 jusqu’à sa mort, il a marqué l’histoire en devenant le premier cardinal de la République Démocratique du Congo, alors connue sous le nom de Zaire, en 1969. Sa vie a été dédiée à l’évangélisation, à la justice sociale et à la résistance contre les abus du régime autoritaire de Mobutu Sese Seko. Malula a constamment prôné un catholicisme enraciné dans la culture africaine tout en s’opposant aux influences néo-coloniales et à la marginalisation du peuple congolais par les élites politiques de l’époque.
Jeunesse et Formation#
Joseph-Albert Malula est né le 12 décembre 1917 à Léopoldville, aujourd’hui Kinshasa, dans ce qui était alors le Congo belge. Fils de Remacle Ngalula et Jeanne Bolumbu, il reçoit une éducation catholique rigoureuse sous la direction de Fr. Raphaël de la Kethulle de Ryhove. Il fréquente ensuite le séminaire mineur de Mbata Kiela de 1931 à 1934, où il rencontre Joseph Kasa-Vubu, futur premier président de la République du Congo (Thibon, 2004). Il poursuit ensuite ses études au séminaire de Bolongo à Lisala jusqu’en 1937, avant d’entamer des études de philosophie et de théologie au Grand Séminaire du Christ-Roi à Kabwe (1937-1944).
Malula est ordonné prêtre le 9 juin 1946 par l’évêque Georges Six, CICM, lors d’une grande célébration au Stade Reine Astrid de Léopoldville. Dès ses premières années dans le sacerdoce, il enseigne au séminaire mineur de Bokoro et sert comme vicaire dans plusieurs paroisses de la capitale. Ce mélange d’enseignement et de ministère paroissial façonne son approche pastorale, qu’il orientera plus tard vers l’inculturation du christianisme en Afrique (De Saint Moulin, 2014).
Ascension dans l’Église et Engagement au Concile Vatican II#
Le 18 juillet 1959, le pape Jean XXIII nomme Joseph-Albert Malula évêque auxiliaire de Léopoldville et évêque titulaire d’Attanasus. Sa consécration épiscopale a lieu le 20 septembre de la même année, sous la présidence de l’archevêque Félix Scalais, CICM, au Stade Tata Raphaël. Cet événement marque une étape décisive dans sa carrière ecclésiastique, car il commence à représenter une voix puissante au sein de l’Église catholique africaine (Jadot, 2009).
Entre 1962 et 1965, Malula participe activement aux sessions du Concile Vatican II, un moment crucial pour l’Église mondiale. Il joue un rôle central dans la réflexion sur la manière dont l’Église catholique en Afrique doit s’adapter aux réalités locales, tout en respectant la doctrine catholique universelle. En 1964, il est nommé archevêque de Léopoldville et intronisé le 27 août de la même année. Sous son impulsion, l’archidiocèse adopte un programme de réformes qui promeut l’africanisation de l’Église (Thibon, 2004).
Cardinalat et Tensions avec Mobutu#
Le 28 avril 1969, le pape Paul VI élève Joseph-Albert Malula au rang de cardinal, faisant de lui le premier cardinal du Zaïre. À cette époque, Malula devient non seulement une figure religieuse majeure, mais également une voix critique face aux abus du régime de Mobutu Sese Seko. Il n’hésite pas à dénoncer les injustices sociales et économiques sous le régime dictatorial, prônant une Église qui ne soit pas seulement un bastion spirituel, mais aussi un acteur pour la justice sociale.
En 1970, lors d’une messe où Mobutu est présent, le cardinal critique ouvertement l’élite zaïroise, affirmant qu’elle « s’enrichit au détriment du peuple », exacerbant ainsi la tension avec le régime (De Schryver, 2012). L’année suivante, Malula prend position contre la politique de la « Zaïrisation » imposée par Mobutu, en particulier l’abandon des prénoms chrétiens. Dans un article de la revue Afrique Chrétienne, il affirme que « renoncer à son prénom chrétien est une perte d’identité spirituelle » (Afrique Chrétienne, 1971). En représailles, Mobutu expulse Malula de sa résidence gouvernementale et suspend la revue pendant six mois.
Engagement pour l’Inculturation et la Réforme de l’Église#
Malula était fermement engagé à adapter le catholicisme aux réalités africaines. À travers son concept d’inculturation, il cherchait à intégrer la culture congolaise dans la liturgie et les pratiques religieuses, tout en respectant la doctrine universelle de l’Église catholique (Gauthier, 2007). Il a introduit l’usage du lingala, une langue locale, dans les offices religieux, et a encouragé la promotion des traditions africaines dans la foi chrétienne.
Tableau 1 : Dates Clés de la Vie de Joseph-Albert Malula
Année | Événement |
---|---|
1917 | Naissance à Léopoldville |
1946 | Ordination sacerdotale |
1959 | Nommé évêque auxiliaire de Léopoldville |
1964 | Archevêque de Léopoldville |
1969 | Création cardinalice par le pape Paul VI |
1971 | Expulsion de sa résidence par Mobutu |
1989 | Décès à Louvain, Belgique |
Participation aux Conclaves et Réflexion sur l’Avenir de l’Église#
Malula a également été l’un des cardinaux électeurs lors des conclaves de 1978, qui ont vu l’élection de Jean-Paul Ier en août, puis de Jean-Paul II en octobre de la même année. Il a soutenu publiquement le cardinal Albino Luciani lors du premier conclave, témoignant de son aspiration à une Église plus ouverte et plus proche des besoins des fidèles, notamment dans le contexte des pays du Sud (Thibon, 2004).
Avant le second conclave de 1978, Malula critique ouvertement la « pompe impériale » du Vatican, affirmant que « tout cet héritage médiéval et cet isolement du pape ne correspondent plus aux attentes des jeunes nations comme la nôtre. Nous voulons la simplicité, nous voulons Jésus-Christ » (Jadot, 2009). Cette déclaration souligne son désir d’une Église plus en phase avec les réalités du Tiers-Monde, une Église qui se concentre davantage sur l’essentiel de la foi chrétienne plutôt que sur les traditions séculaires européennes.
La Mort et l’Héritage de Malula#
Joseph-Albert Malula est décédé le 14 juin 1989 dans un hôpital de Louvain, en Belgique, à l’âge de 71 ans. Il est inhumé à la Cathédrale Notre-Dame du Congo à Kinshasa. Son décès a marqué la fin d’une ère pour l’Église congolaise, mais son héritage continue d’inspirer les efforts de justice sociale, d’autonomie spirituelle et d’inculturation dans toute l’Afrique (De Schryver, 2012).
Tableau 2 : Les Principales Contributions de Joseph-Albert Malula
Contribution | Détail |
---|---|
Africanisation de l’Église | Promotion des langues locales et des coutumes africaines dans la liturgie |
Défense des droits humains | Critiques ouvertes contre le régime de Mobutu |
Représentation internationale | Participation active aux conciles et conclaves |
Résistance spirituelle | Opposition à la « Zaïrisation » et aux réformes autoritaires de Mobutu |
Conclusion#
Joseph-Albert Malula reste une figure monumentale de l’histoire de l’Église en Afrique. Par son engagement pour l’inculturation, son courage face à l’injustice et son rôle de leader spirituel, il a façonné non seulement le catholicisme congolais, mais aussi le débat sur le rôle de l’Église dans les sociétés post-coloniales. Son héritage est une source d’inspiration pour les générations futures, tant dans le domaine de la foi que dans celui de la lutte pour les droits humains.
Références
Afrique Chrétienne. (1971). Le débat sur les prénoms chrétiens. Revue Afrique Chrétienne, 21(4), 56-60.
De Saint Moulin, L. (2014). L’Église catholique et la politique au Congo : Le rôle de Joseph-Albert Malula. Kinshasa : Presses Universitaires de l’UNIKIN.
De Schryver, A. (2012). Joseph-Albert Malula et l’inculturation de l’Église en Afrique. Bruxelles : CEDAF.
Gauthier, F. (2007). L’Église et la résistance au Zaïre sous Mobutu. Paris : Karthala.
Jadot, J. (2009). Le Cardinal Malula : Un leader dans la tempête. Revue Internationale d’Études Africaines, 32(1), 85-102.
Thibon, R. (2004). Le Catholicisme et l’indépendance africaine : Le rôle de Joseph-Albert Malula au Congo-Zaïre. Louvain: Peeters.
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